Historique

La maison qui vous accueille a été ouverte en 1923, construite dans les années qui suivirent la première guerre mondiale (1914-1918), par les villageois. Le terrain a été donné par la famille de L’Hermuzière, les fonds par des bienfaiteurs divers, en particulier M. Marrel, industriel de Rive de Gier. L’architecte est Emmanuel Vitou. Pourquoi ? – Pour accueillir les nombreux pèlerins venus prier à Lalouvesc et qui étaient obligés de dormir sur les dalles de la basilique.
Par qui ? – Par un homme extraordinaire, le père Pierre Bonnard, que cette notice veut vous faire connaître.

Pierre Bonnard, jésuite, est né en 1862 et mort en 1950, à l’âge de 87 ans. Il a passé cinquante ans à Lalouvesc, d’une étonnante vitalité jusqu’à ses derniers jours : un homme de petite taille, vif et souriant toujours aimable, au regard attentif. C’était un homme passionné de l’amour de Dieu et un serviteur des hommes infatigable.

Tous les villageois le considéraient comme un saint.

Une bonté souriante émanait de lui. Il avait un don particulier pour écouter, comprendre ceux qui souffraient, les encourager et les conseiller. Comme pour son aîné, le missionnaire jésuite saint Jean-François Régis, mort à Lalouvesc en 1640, quatre siècles plus tôt la bonté attire. Le pèlerinage se développe considérablement. C’est ainsi que le père Bonnard invite un jour les paroissiens à la messe de construire un abri pour accueillir les pèlerins.
Ce passionné de Dieu reçoit la grâce d’une étonnante efficacité dans ses entreprises. Arrivé à Lalouvesc en 1901 en période de persécution contre les religieux, il doit loger chez l’habitant.

Quelques années plus tard, il ne tarde pas à fonder un syndicat agricole, qui achète une machine à battre le blé. Quand la guerre de 14 éclate, le village voit tous les hommes valides partir à la guerre. L’hécatombe commence, il n’y aura pas moins de 53 hommes du village qui ne reviendront pas. Le battage du blé est interrompu, faute de travailleurs. Pierre Bonnard, déjà âgé de 52 ans, et à la vue très faible, n’est pas mobilisé : il monte sur la batteuse et, sous sa direction, avec le concours de tous les gens valides, le travail s’accomplit. C’est encore à son initiative que l’on doit l’aménagement de la belle esplanade devant la basilique, une bibliothèque, le cinéma, un terrain de tennis pour les jeunes.
Le père Bonnard passait un temps considérable à recevoir les pèlerins, à leur donner le sacrement de réconciliation, comme Jean-Marie Vianney, dont la mémoire est bien présente à Lalouvesc, puisque Jean-Marie y était venu en pèlerinage se confier à l’intercession de saint Régis, au moment où il avait de grandes difficultés pour étudier en vue de devenir prêtre. Jusque vers la fin, il faisait le catéchisme aux enfants, assistait les mourants.
Comme le curé d’Ars encore, le père Bonnard était solidaire du peuple des pauvres, des petits, des malades qu’il allait visiter, ne craignant pas de faire une longue marche d’une vingtaine de kilomètres pour voir l’un d’entre eux.

« Je les aime trop pour ne pas souffrir avec eux».

Un soir de dimanche d’automne, avant 1914, nous raconte une paroissienne, on vient lui demander de donner les derniers sacrements à une mère de famille de trois enfants qui se mourait de ne pouvoir mettre le quatrième au monde. Elle habitait dans le fond du ravin, à trois ou quatre kilomètres du bourg. Après avoir prié avec la mourante, navré de ne pouvoir rien faire, le père Bonnard s’en retourne en priant de tout son cœur pour cette femme, son mari et les trois petits enfants endormis dans les coins de la maison. Il pense alors à un médecin de passage à Lalouvesc, grand chirurgien, dont il est l’ami : il va le trouver, le convainc non sans peine. Celui-ci se rend en maugréant auprès de la maman et fait une césarienne avec les moyens du bord, avec l’aide du père. L’opération réussit parfaitement : la mère et l’enfant sont sauvés. Au retour, le médecin embrassa le père : « Mon petit père, vous venez de me faire faire la plus belle opération de ma vie, et dans quelles conditions ! Dommage que mes élèves n’aient pu y assister ! »
La dernière parole du père Bonnard, avant de mourir, fut : « Je vous aime ». Une parole adressée à Dieu, mais aussi à ses chers paroissiens de Lalouvesc. Il a été enterré avec ses frères jésuites et son propre frère Stéphane, son cadet jésuite aussi, décédé onze ans plus tôt, au cimetière de Lalouvesc.

Si vous voulez en savoir plus sur la vie de cet homme étonnant et sa vie mystique, vous pouvez lire :
* Louis PIZE, Un messager de Dieu sur la montagne, le père Bonnard, 39 p., Imprimeur Joseph
Albert Domergue, Romans, 1951.
* Louise CAMUS, Une flamme d’amour, l’humble père Bonnard, Lalouvesc, 1956